La résistance des artisans du bâtiment à la crise Covid

Même masqués, depuis l’automne dernier les artisans du bâtiment affichent une santé insolente ! Malgré la longue période d’hibernation du confinement, tous leurs indicateurs d’activité ou presque sont au vert. Ce confinement a révélé aux français à quel point le confort, l’espace et l’organisation de leur logement était vital pour y vivre et désormais y travailler au quotidien. Comment en est-on arrivé là ? Cette tendance dynamique va-t-elle se poursuivre dans les prochains mois ? Y a-t-il des ombres à ce beau tableau ?

Décryptage et éléments de réponse dans cet article.

 

Des chantiers à l’arrêt aux chantiers sans arrêt… Chronique et statistiques d’une année folle.

On ne mesurera jamais assez la sidération et le traumatisme suscités par le premier confinement, ce terrible impact économique d’un secteur du bâtiment quasiment à l’arrêt… Rappelons-nous, ces chiffres effrayants du printemps 2020 :

- Un recours au chômage partiel touchant jusqu’à 70% des entreprises

- Une baisse d’activité équivalente à -30% du PIB.

A la veille de la sortie du premier confinement, les préoccupations ne manquaient pas pour eux :

  • Compter les jours de travail et les chantiers perdus
  • Se fournir en moyens de protection sanitaire contre le virus
  • Mettre en place les consignes de distanciation au sein des équipes
  • Relancer les devis et chantiers d’avant Covid
  • Anticiper les besoins en matériel et en effectif pour accompagner la reprise d’activité de la rentrée
  • Protéger sa trésorerie et sa solvabilité

Entre inquiétude, résignation et optimisme, l’artisanat du bâtiment n’en menait pas large à l’époque… Et pourtant, le secteur a bien repris !

14 mois plus tard en effet, force est de constater que les interminables confinements à rallonge qui ont suivi n’ont pas eu raison du dynamisme de la filière, bien au contraire… Car aujourd’hui, enfin déconfinés, tous les métiers de l’artisanat travaillent en sur-régime, notamment pour répondre à la demande liée aux travaux de rénovation.

Jugez-en plutôt par ces chiffres :

  • Le nombre de salariés dans le bâtiment a progressé de +3% par rapport à 2019, soit près de 25 000 emplois supplémentaires (*), bien au-dessus de la moyenne des autres secteurs !

A l’inverse du 1er confinement, l’impact du second et du 3e a été beaucoup mieux maîtrisé.

2 raisons à cela :

  • Constituée très majoritairement de TPE et PME, l’artisanat du bâtiment s’est plutôt bien adapté aux mesures sanitaires, se donnant les moyens de combler en grande partie le retard accumulé dans le calendrier des chantiers livrables.
  • L’instruction des permis de construire et les formalités administratives ont été moins contraintes à partir du dernier trimestre 2020.

Tous les métiers du bâtiment ne sont pourtant pas logés à la même enseigne en matière d’emploi… Les statistiques indiquent ainsi que ce sont l’électricité/plomberie, la maçonnerie et les métiers de la finition qui affichent la plus forte progression. Pour la maçonnerie cela représente concrètement +3% et pas moins de 8 500 emplois créés en 2020 !

(*) Source : baromètre annuel de l’artisanat réalisé par l’Institut supérieur des métiers et l’assureur MAAF.

  • Le nombre de créations d’entreprises et de faillites illustrent la performance du secteur : 21 000 entreprises ont été créées dans le BTP au cours du premier quadrimestre 2021, soit 12% de plus que l’an dernier à la même période et surtout en légère hausse comparée à 2019.

 

Depuis juin 2020, un niveau d’activité chantiers entre résilience et dynamisme

Malgré l’effondrement des carnets de commandes au cours du premier confinement, le BTP a clôturé 2020 avec une surprenante croissance de +7%, résultat à la fois d’un relatif bon début d’année d’avant Covid et de l’emballement de l’activité depuis l’automne dernier.

Mieux, si l’on raisonne sur la période annuelle des 12 derniers mois (mai 2020 – mai 2021), la progression du secteur serait de près de 20%, effaçant complètement l’impact du second et troisième confinement !

Amplifiée psychologiquement par le calendrier du déconfinement et l’arrivée des beaux jours, la météo du bâtiment affiche désormais un optimisme au beau fixe… A l’exception on le verra de la construction neuve.

Sondés il y a quelques semaines sur leurs perspectives d’activité, la plupart des secteurs de l’économie semblaient attentistes et au mieux prudemment optimistes là où près de la moitié des entreprises du BTP pronostiquaient une activité en croissance pour les prochains mois !

 

Quelques domaines sérieux d’inquiétude à court terme

Pour le BTP, tous les voyants ne sont pas forcément au vert. Une certaine inquiétude subsiste en effet dans 2 domaines :

  • L’effondrement de la construction neuve de logements

Après une année 2020 catastrophique en termes de permis de construire (-15%), la dégradation perdure cette année et on se dirige avec 315 000 logements prévus vers le bilan le plus mauvais depuis 25 ans ! En cause : la pénurie de l’offre, les blocages et l’attentisme politique en marge des élections municipales 2020, les retards de chantier liés à la crise sanitaire, l’inflation des coûts constructifs et des prix de l’immobilier.

  • La pénurie de matériaux de construction et de composants

Alimentée par la désorganisation industrielle mondiale issue de la crise économique Covid et par l’explosion de la demande liée à la reprise économique, cette pénurie a pour conséquence :

  • Une répercussion par les industriels de très fortes hausses de prix notamment sur l’acier, le bois, le cuivre, les matériaux isolants et les puces électroniques.
  • Un allongement des délais de livraison des chantiers

Malgré ces quelques inquiétudes conjoncturelles, l’univers du bâtiment se porte bien pour le moment, et les entreprises de maçonnerie qui nous lisent ne seront sans doute pas les dernières à en tirer les bénéfices !

Plusieurs facteurs externes permettent raisonnablement d’y croire :

  • Le spectaculaire dynamisme du marché de la rénovation

Tiré par la demande des particuliers d’amélioration du confort de leur habitat, par le niveau d’épargne accumulés par les français durant les confinements et par les nombreuses aides de l’Etat pour encourager la transition énergétique (ex : Ma PrimeRenov’, CEE isolation, aides ANAH…)

  • L’entrée en vigueur de la future réglementation environnementale du bâtiment (RE 2021)

La date est prévue dans le neuf au 1er janvier 2022 et dont l’ambition répond à 3 objectifs :

- diminuer l’impact carbone des bâtiments

- accélérer l’amélioration de leurs performances énergétiques (au-delà des exigences de la RT 2012)

– garantir la fraicheur des espaces intérieurs de vie pendant les étés caniculaires.

 

Donc attendez-vous pour les prochaines années à une forte demande de travaux de mise aux normes de la part des propriétaires bailleurs du privé.

Un état des lieux du BTP certes toujours fragile mais dont les signes de reprise dynamique et durable ne manquent pas… Pour peu que les acteurs de la filière manifestent agilité, anticipation et optimisme !